Histoire du JV - les années 80 (partie 1)
Maître Jedi des requêtes SQL.
Les jeux qui m'ont marqué:Half-life, Tomb Raider, FFVII, Diablo, Derrick : meurtre dans un parterre de fleurs
1980 - 1983 : de Pac-Man à la crise de 83
Pour les jeunes qui sont nés comme moi dans les années 70, les années 80 raisonnent plus particulièrement dans nos cœurs comme la décennie de rêve pour les joueurs que nous allions devenir. Il faut dire que tout un monde était en train de s'offrir à nous. Quand les premiers micros, les premières consoles arrivent, c'est une Révolution! Je me souviens encore de mes petits doigts se posant sur mon premier clavier et ma main sur mon premier Joystick. Et que dire des jeux d'arcade qui petit à petit remplaçaient les flippers dans les cafés.
Voila pourquoi cette décennie représente notre Age d'or du JV, c'est la bienveillance mêlée à la nostalgie d'une époque révolue mais vécue qui nous pousse à idéaliser ce moment unique de notre vie. L'industrie faisait de multiples essais, beaucoup d'échecs aussi mais on tentait tellement de chose. Mais tout n'était pas rose, loin s'en faut, l'abondance de production avait aussi son long cortège de daubes infâmes, les sorties mondiales n'existaient pas, les jeux import coutaient un bras.
Mais surtout on idéalise cette période car elle est matinée d'une sorte d'innocence aujourd'hui perdue. Il n'y avait ni internet ni réseaux sociaux et encore moins de Youtuber pour vous spoiler le dernier jeu que vous attendiez. La découverte était totale et il fallait même parfois attendre l'arrivée des jeux plusieurs mois voire plusieurs années après leur sortie outre atlantique.
Mais cette folle époque est aussi la période durant laquelle le nombre de mauvais jeux produits est astronomique, ce qui va d'ailleurs faire connaitre à l'industrie sa première grande crise. C'est cette période entre 1980 et 1983, certes courte mais fondamentale, que nous allons relater dans cet épisode.
L'arcade domine toujours...
Voici à quoi ressemblait une salle d'arcade, toute une époque
Il y en a peut être qui parmi vous n'ont jamais mis les pieds dans une salle d'arcade. Difficile à croire pour un terrien des années 80. Il faut dire qu'elles étaient le seul lieu pour s'adonner à notre passion commune du jeu dans un siècle où tout le monde ne possédait pas une console, un coûteux micro ou un smartphone.
Après Space Invaders et Asteroids respectivement en 1978 et 1979, l'arcade va d'ailleurs connaitre ses plus belles heures de gloire durant les 80s, on peut même parler de croissance exponentielle.
A commencer par 1980 qui marque la sortie de la boule jaune la plus populaire de l'histoire, PAC MAN (ou Puck Man comme il aurait dû s'appeler avant d'arriver aux Etats Unis...). Toru Iwatani, le créateur japonais du glouton, intègre dans son jeu une IA astucieuse qui fera son succès. Doté qu'un Gameplay intelligent où chaque ennemi (les fantômes) dispose de son propre algorithme de comportement, il faut dévorer toutes les pastilles d'un niveau labyrinthique sans se faire attraper par la patrouille. Le succès planétaire du jeu jeu viendra aussi du fait que Namco tente une approche tout public avec un personnage mignon et enfantin à contre courant des jeux de guerre et de destruction.
Justement, dans le monde de l'arcade un genre se distingue plus particulièrement, le Shoot Them Up. Depuis Space Invaders, ils sont nombreux à tenter de se démarquer en apportant de nouvelles sensations de jeu. Stratavox, par exemple, est le premier à intégrer des sons reproduisant une voix digitalisée. Phoenix avec ses boss gigantesques, Centipède l'insectoïde et Scramble pour combattre au sol comme dans les airs, proposent eux aussi une expérience novatrice tout en restant dans le genre destructeur d'aliens en tout genre.
Mais quand Galaxian surfe sur la mode des SHMUP comme on dit, Galaga (à droite) lui apporte un vrai plus en introduisant des boss capturant votre vaisseau, la suite je vous laisse la deviner en vous replongeant dans ce monument du genre.
En 1981, surfant sur la vague du succès de Pac Man et histoire de ne pas proposer un énième SHMUP, Shigeru Miyamoto, alors tout jeune illustrateur chez Nintendo invente le premier jeu de plates-formes de l'histoire, à savoir Donkey Kong. Mettant en scène Popeye à l'origine, c'est finalement Jump Man, plombier au grand cœur aux prises avec ce fagotin de Kong qui se chargera de délivrer une princesse en détresse, Nintendo tient la le scenario de ses hits à venir...
Q-Bert est cette étrange créature que l'on aperçoit dans le film de Pixar Wreck it Ralph et qui parle un dialecte incompréhensible. Dans la même veine que Pac Mac (sauf que le terrain de jeu est cette fois une pyramide en 3D) il rencontre en 1982 un succès pour le moins inattendu mais qui le range parmi les jeux d'arcade cultes de nos jours.
En 1982, après Par Mac Toru Iwatani s'attaque aux courses de voiture. Pole Position est souvent cité à juste titre comme le premier jeu de course moderne car pour la première fois le joueur est confronté à une IA et il faut passer par une séance de qualification avant d'accéder au championnat de Formule 1 dans le but de nous offrir plus de réalisme.
Vous vous demandez comment simuler une épreuve d'athlétisme en 1983 ? Et bien allez voir du côté de Konami avec Track and Field et préparez vos doigts pour appuyer en alternance frénétiquement sur les touches afin de faire avancer votre coureur. Il devait s'agit certainement du premier qui demanda de donner autant de sa personne pour gagner, d'aucun y auront laissé un pouce ou plus...
De gauche à droite : Pole position, Q-Bert et Track and Field
...mais le JV pénètre dans les foyers et devient de plus en plus populaire
Si l'arcade domine encore largement dans les années 80, c'est justement en adaptant ses titres les plus emblématiques que le JV sur console va créer ses lettres de noblesse.
L'arrivée de Space Invaders en 1980 sur l'Atari 2600 fait exploser les ventes de la console et propulse les petits envahisseurs au firmament du loisir électronique et de la culture pop. Viendrons ensuite les portages de Pac Man et Donkey Kong, véritables porte-étendard des consoles de 2nd génération comme Intellivision et ColecoVision.
Les adaptations des succès du grand écran comme Star Wars ne tardent pas à pulluler, au détriment de la qualité. Qui se souvient des premiers Star Wars sur Atari ? L'objectif devient plus de produire vite pour vendre vite, stratégie qui va s'avérer néfaste par la suite.
De gauche à droite : Donkey Kong (81), Dig Dug (82) et Space Invaders (80) sur Atari 2600
Parmi les titres mémorable de l'Atari VCS, Dig Dug détient une place à part. Il a été le premier titre en ma possession et je me souviens encore des soirées passées à creuser des tunnels et dégommer du monstre au laser.
De gauche à droite : Star Wars Death Star, Tapper, Empire Strikes Back
Autre petite révolution et non des moindres: les gens d'Atari inventent un peu malgré eux le concept d'éditeur tiers. A l'époque, il s'agit de développeurs qui décident de s'émanciper du joug d'Atari qui ne les rémunère pas assez et créent donc en réaction leur propre boîte de développement et d'édition, ainsi nait un certain Activision qui va produire un nombre conséquent de jeux pour la console d'Atari et avec un certain succès puisqu'on leur doit quelques bons titres comme par exemple Tennis qui sort du schéma habituel de Pong en proposant une vue en perspective plus réaliste.
Vous avez dit Portable ?
Si comme moi vous aviez 10 ans dans les années 80, vous avez surement connu les Game & Watch avec leur écran à cristaux liquides.
Et oui, bien avant la Gameboy, Gunpei Yokoi propulse Nintendo dans le monde du jeu électronique portable avec ses Game & Watch inventés en 1980. Avant de devenir le champion des jeux vidéo, Nintendo s'illustre donc en produisant des succès comme Donkey Kong sur Game & Watch avec double écran qui a forcement dû passer entre vos mains si vous êtes de cette génération. Pas étonnant de les voir plus tard dominer le marché du jeu portable.
Côté matériel, c'est Mattel qui s'illustre en 1980 avec la sortie de l'Intellivision qui s'annonce comme une concurrente sérieuse de l'Atari 2600 et que l'on garde plus en mémoire pour ses contrôleurs improbables. Forte d'un collection d'une centaine de jeux dont pas mal de simulation de sport (Football, baseball, basquet...), elle sera hélas une des victimes du terrible Krach de 1983. L'excellent article de votre serviteur sur le sujet relate comment Mattel est passé des poupées Barbies aux jeux vidéo en créant la 1ère console 16bits de l'histoire bien avant tout le monde, preuve que la puissance ne suffit pas pour marquer les annales du JV: Intellivision, la télévision intelligente
En 1982, après Atari et Mattel, Coleco se lance à son tour dans la bataille avec la Colecovision qui passera comme une étoile filante avec une durée de vie très courte mais intense puisqu'elle sera la console la plus vendue à sa sortie au USA. On s'en souviendra surtout pour ses portages sublimes de l'arcade qui restent à mon sens les meilleurs de l'époque, il suffit de comparer les versions de Donkey Kong sur Atari et Mattel pour s'en rendre compte. La console surpasse de la tête et des épaules ses concurrents mais elle ne connaitra pas le succès de l'Atari VCS . Sans doute arrivé au plus mauvais moment, Coleco ne se relèvera pas de la crise de 1983 et abandonnera le secteur puis fera faillite un peu avant la fin des années 80. Triste histoire pour une console qui connaitra un regain d'intérêt bien plus tard puisqu'aujourd'hui certains lui vouent un culte méritée. Et que dire de ce bel hommage rendu par Steven Spielberg dans Ready Player One, où elle trône fièrement dans la chambre du jeune Halliday... Pour en savoir plus n'hésitez pas à consulter l'article sur La Colecovision reine des années 80
Micro "procession"
Alors que les universités continuent de produire des jeux toujours plus complexes sur les supers ordinateurs dont elle sont pourvues, le grand public va enfin pouvoir à son tour profiter de ce loisir à moindre frais sur clavier et moniteur.
C'est un peu la ruée vers l'or de l'informatique, car à cette époque il n'y a pas encore de plateforme hégémonique comme le PC ou le MAC. C'est le temps des MSX, du Vic de commodore, du TRS-80, de l'Apple 2 et bien sûr de ce bon vieux Commodore 64 en 1982 qui reste un des micro les plus vendus au monde dans les 80's. Et qui dire du ZX Spectrum, micro proposé entièrement en kit pour un prix imbattable. Même si le PC d'IBM arrive en 1981, il est encore dédié à l'informatique de bureau et personne à l'époque n'aurait parié une pistole sur son destin hégémonique.
Les premiers jeux d'aventure
Le Micro est le support idéal pour les jeux d'aventure d'abord textuels puis bientôt agrémentés de graphismes, et c'est sur Apple 2 qu'on aura droit aux premiers coups d'essai du genre.
Dès 1980, sort Mystery House sur Apple 2, 1er jeu d'aventure avec des graphismes créés par Roberta et Ken Williams en a peine 4 mois et qui fonderont plus tard Sierra On-Line, Studio mythique des années 80-90. Elle était belle l'époque où on pouvait faire des jeux avec une équipe de 2 personnes en un temps record.
Le premier Ultima sort également sur Apple 2 en 1981 et marquera toute une génération de joueurs attirés par les jeux de rôles à base de Dungeons&Dragons.
Décidément, l'Apple 2 aura été une vraie machine à hits, puisque c'est en 1981 que nait une licence de légende, Castle Wolfenstein, jeux d'infiltration au départ dans lequel vous explorez un château infesté de nazis et où la confrontation directe est une option à proscrire sous peine d'ameuter tout la division ennemie. Prenant le contre pied de l'époque ce choix s'avèrera gagnant. La version C64 sortie en 1983 permet d'apprécier pleinement le jeu (ci-dessous).
La crise de 1983 purge une industrie devenue trop avide
La multiplication des supports et des jeux pas toujours de qualité va créer la surabondance d'une offre à la recherche de profits toujours plus rapides et un tarissement d'une demande qui commence à se détourner du JV.
Presque sans le vouloir Atari a ouvert la boite de pandore en laissant les éditeurs tiers créer des jeux pour sa console sans avoir le moindre contrôle dessus. La machine s'emballe. Les adaptations de succès cinématographiques n'arrivent pas vraiment à convaincre (Star Wars est décevant sur Atari) et l'adaptation d'ET l'Extraterrestre sera un vrai scandale et la goutte de trop dans le vase de la médiocrité.
Pourtant sur arcade les hits s'accumulent, et en 1983 Nintendo commercialise la borne Mario Bros (ex Jump Man de Donkey Kong) qui fera un carton. Notons que la première version de Mario sur console sort sur ... ATARI 2600!
La crise qui produit ses effets au début de l'année 1984 est surtout américaine et ses effets sont surtout dévastateurs pour les entreprises outre atlantique.
Et la Famicom fut...
Alors que le marché du jeu vidéo s'abîme aux Etats-Unis, Atari boit la tasse et se retrouve en situation de faillite. Au même moment, Nintendo sort la Famicom pile en 1983 car le Japon semble épargné par la crise. Ils en profitent pour porter avec brio leurs meilleurs hits de l'arcade, de Donkey Kong à Mario Bros. Le succès est immédiat.
Comble de la loose, ne croyant pas en la machine de la firme de Kyoto, Atari refusera de distribuer la Famicom aux USA. La suite de l'histoire donnera tort aux américains puisqu'on connait le succès de la NES au pays de l'oncle Sam.
Conclusion et avis
La crise de 83 est révélatrice d'une époque un peu Far West du JV. De nombreuses sociétés en font les frais et la purge est terrible pour les studios américains en général mais aussi et surtout pour le leader de l'arcade et des consoles Atari. Les moins solides disparaissent tout simplement ce qui aura pour conséquence d'assainir pour un temps le marché. Mais on aura une pensée pour l'Intellivision et la ColecoVision qui n'en réchapperont pas même si sur le papier elles avaient tout pour réussir.
Néanmoins, les innovations et les tendances du début des années 80 vont durablement marquer l'industrie qui voit naitre la plupart de ses fondamentaux.
Atari ne se remettra pas entièrement de cette crise et c'est bien au pays du soleil levant que le futur du jeu vidéo va s'écrire.
A suivre: Les années 80 - 2ème partie
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Excellent article, passionnant, une mine d'or, bravo Nono!
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