Krach du Jeu Vidéo de 1983













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Quand le jeu vidéo naissant se crache en plein vol, principalement aux USA et en particulier sur le géant ATARI

Née dans les années 70, l'industrie du jeu vidéo devient "mainstream" vers la fin de la décennie. C'est la société ATARI, fondée par Nolan Brushnell en 1972, qui démocratise aux Etats Unis ce médium encore cantonné dans les universités et sur des machines grosses comme un appartement parisien.
En 1973, ATARI signe son premier véritable succès avec PONG, une borne d'arcade intuitive et aux mécaniques terriblement efficaces (et avec la possibilité de jouer à deux).
PONG révolutionne le jeu vidéo en devenant le premier gros succès du jeu vidéo des années 70
Si les bornes d'arcade, machine à circuit imprimé dédié, sont alors le seul vecteur de diffusion du média, rapidement Buschnell imagine une machine à cartouche interchangeable, l'ATARI VCS ou ATARI 2600. C'est le véritable tournant, le JV s'invite alors dans les foyers et son succès va grandissant auprès du public.
Cependant, la croissance vertigineuse du secteur s'accompagne de son lot d'excès. Les mauvaises décisions des géants du secteur commencent à peser sur la profitabilité du modèle et les premiers échecs ne tardent pas à arriver. Par exemple, les japonais de Nintendo peinent à vendre la borne Radar Scope aux US. Même si le Donkey Kong de Miyamoto vient à la rescousse pour sortir Nintendo of America d'un mauvais pas, cela montre aussi la fragilité de cette industrie naissante qui tâtonne entre succès et échecs cuisants.
De même ATARI, en déclinant la proposition de Nintendo de publier ce même Donkey Kong aux US sur sa console, permet à son concurrent Coleco de récupérer les droits et ainsi d'occulter la nouvelle Atari 5200 en vente dès 1982.
la borne Radar Scope de Nintendo fait un flop aux US est sera recyclée pour faire des cabines Donkey Kong
Entre 1978 et 1981, avec Space Invaders (Taito 1978), Pac-Man (Namco 1980), Defender (Williams 1980) et Donkey Kong (Nintendp 1981), des succès colossaux s'enchainent. En réaction, un nombre considérable d'acteurs se constituent pour se tailler une part dans ce gâteau toujours plus gros...
Space Invaders est un tel hit, que la Banque du Japon sera obligée de mener une enquête sur la pénurie de pièces de 100 yens!
1982: Les premiers symptômes qui témoignent de la fragilité de cette industrie

Alors que le Jeu Vidéo connait son apogée aux USA, poussée par ATARI et les nouvelles bornes d'arcade venues du Japon, les premiers dysfonctionnements apparaissent.
Les jeux vidéos sont néfastes pour les enfants!
C'est pas moi qui le dit, c'est le vénérable Everett Koop dit "Koopman". Fin 1982, il déclare que les JV ont un impact négatif sur la jeunesse et serait cause de violence et d'addictions chez les adolescents.
sans en être la cause directe, cette polémique sur les effets néfastes du JV sur la jeunesse enfonce un premier clou dans le cercueil de l'industrie américaine
Si Koop revient sur ses déclarations en disant qu'il ne s'appuie sur aucune étude scientifique pour appuyer ses dires, il n'en fallait pas moins pour provoquer une défiance irrationnelle de la part des associations de parents inquiets pour leur progéniture.
Des développeurs injustement traités voire méprisés
Le géant du secteur, ATARI, était en permanence à la recherche de jeunes ingénieurs pour développer de nouveaux jeux, notamment sur la console ATARI 2600. A cette époque, une seule personne pouvait développer un jeu et pourtant, Atari ne faisait jamais figurer leur nom dans les crédits ou sur les boites de jeu. Au regard des sommes qu'ils faisaient gagner à leur entreprise, les programmeurs finiront par se sentir floués.
Nombreux sont ceux qui sont partis pour développer leur propre société d'édition. L'exemple le plus frappant et celui des fondateurs d'Activision en 1979, qui ont tous quitté la société pour aller développer des jeux sur l'ATARI 2600 en indépendant. C'est la naissance des éditeurs tiers. Si cela n'est pas une mauvaises chose en soi, cela entrainera un impact considérable sur le marché.
En manque de considération, le développeur de Adventure! est le premier à avoir caché son nom dans un niveau secret du jeu sans le dire à son entreprise! le 1er easter egg de l'histoire parait-il.
Des jeux d'arcade devenus trop durs
C'est un fait, les jeux d'arcade sont avant tout des machines à avaler des pièces de monnaie. Les fabricants vont donc rivaliser d'ingéniosité pour vous arracher les dernières petites piécettes qui trainent au fond de vos poches. Les joueurs les plus expérimentés, les "Gamers" selon l'appellation consacrée, demandent toujours plus de challenge. les jeux deviennent donc plus durs.
La contrepartie est que les joueurs du dimanche, occasionnels, vont se lasser de se faire punir et détrousser aussi hardiment. Ces imbriaques du marketing ne vont pas tarder à déchanter en voyant leur production boudée par la majorité des joueurs. L'arrivée des consoles de salons portent également un coup d'arrêt à la croissance à 2 chiffres de l'industrie des salles obscures.
Le surplus de production sature un marché encore naissant
Si l'appât du gain est à la base du capitalisme moderne, il n'épargne pas l'industrie du jeux vidéo. Devant l'énorme succès du jeu, de nombreux opérateurs d'arcade avait acheté des bornes PAC-Man en pagaille et à crédit. Voulant rentabiliser leur mise, il se mettent à louer les bornes aux exploitants mais la baisse de la fréquentation des salles entraine une chute des loyers. Les premières faillites apparaissent.
Les développeurs tiers vont saturer la demande en mettant sur la marché des jeux pour la console Atari 2600 de piètre qualité. Atari, ne contrôlant pratiquement aucun de ces jeux, laisse faire par intérêt mais aussi par impuissance.
La confiance des consommateurs en Atari et ses jeux va inévitablement s'éroder. A cette époque, les invendus en magasin sont directement renvoyés à l'éditeur. Les stocks commencent à être bradés. Les jeux vendus initialement 30$ passent rapidement à 10$, les éditeurs vont écouler leur production à perte et les investisseurs arrêtent de financer les studios.
Plus qu'un symptôme, le jeu ET est peut être le meilleur exemple de la faillite du business dès 1982. Après avoir acheté les droits d'exploitation à Spielberg à prix d'or (25M$) Atari se voit contraints par ses investisseurs de produire un jeu en 5 semaines. Le résultat est catastrophique et ET devient sans le vouloir le pire jeu de l'histoire et catalyse tous les maux latents
Fin 1982, Atari annonce une chute de ses prévisions de croissance pour le dernier trimestre. La chute de la confiance des investisseurs et le mécanisme de crise s'enclenche. C'est le début de l'ATARI SHOCK.
En 1984 les revenus de l'arcade étaient divisés par 2 et Atari se retrouvait au bord de la faillite.
Le jeu vidéo renait de ses cendres au milieu des années 80

De ces cendres, l'industrie renaitra au milieu des années 80 mais au Japon cette fois ci. Nintendo lance la Famicom qui devient la NES aux USA.
Si la console de Nintendo devient un succès colossal au pays de l'oncle Sam, les consommateurs ont cependant gardé une forte méfiance pour le marché des consoles américaines. Afin de garantir la qualité des jeux sortant sur sa plateforme, Nintendo contrôle et limite drastiquement la production et le nombre des éditeurs tiers. Malgré quelques excès cette stratégie permettra de redonner confiance aux joueurs.
Nintendo monopolisant le marché des consoles, les microordinateurs vont se tailler une bonne part de marché en vantant leur versatilité. C'est l'époque du C64 aux USA et du ZX Spectrum ou de l'AMSTRAD CPC en Europe et surtout en France pour ce dernier! Il faudra attendre le début des années 2000 pour qu'un constructeur américain se lance à nouveau sur le marché des consoles avec la XBOX.
Jack Tramiel, rescapé d'Auschwitz, est la figure derrière le succès du C64 puis du micro Atari ST
2019-2024: vers une nouvelle crise de l'offre
La suite de l'histoire, vous la connaissez tous. L'industrie du JV dépasse aujourd'hui le cinéma et la musique, et de loin. Pourtant on a tendance à oublier que les chiffres sont trompeurs car ils sont mélangés avec l'industrie mobile qui n'est pas du vrai jeu vidéo, en toute honnêteté.
Mais il y a plus grave. Les coûts et délais de production des jeux sont devenus astronomiques. Par conséquents, les studios ont une pression de plus en plus folle. La prise de risque est donc limitée et les éditeurs ont tendance à reprendre des formules qui ont déjà trop bien fonctionnées.
Les derniers bides des grosses productions d'Ubisoft (pour ne citer que cette société), nous rappellent hélas, comme en 1982, qu'ils s'en faut peu pour détruire la confiance du consommateur.
Tout comme ET en son temps, Star Wars Outlaws pourrait être le révélateur d'une industrie malade et fainéante qui s'obstine à produire des clones et des jeux qui ratent complètement leur cible, un peu comme Disney au cinéma...
Si les joueurs se sont comportés comme des vaches à lait pendant des années, les mauvaises ventes des derniers triples A occidentaux montrent que l'industrie va devoir sacrément se réinventer si elle veut retrouver la confiance de ses joueurs.
L'offre étant plus large d'autrefois, ils sont de plus en plus séduits par des productions non occidentales (chinoises par exemple). Il semblerait qu'une crise se profile (les récents licenciements le prouvent) et elle risque d'être plus violente et mondiale que celle des années 80 qui avait surtout touchée les Etats-Unis.
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